corpus sur la courtisane

quelques pistes sur les documents

Le tableau de Manet est un hommage manifeste au roman de Zola. Nana, la fille de Gervaise Lantier, obtient une revanche sociale grâce à son charme et à sa sensualité qui mettent à ses pieds les plus grandes fortunes du Second Empire. Dans la représentation qu’en fait ici Manet, aucun doute n’est possible sur son statut social. La jeune femme est représentée au premier plan, centrée, vêtue seulement de sous-vêtements, les bras et le cou ronds et nus : elle se tient de profil, le visage tourné vers le spectateur de la toile à qui elle semble adresser une œillade coquine. La houppette à la main, face à un grand miroir sur pied, elle achève sa toilette, tandis qu’au second plan, assis sur un canapé marron, un élégant en costume noir et haut de forme, à moitié hors champ, surveille ses derniers préparatifs, les jambes croisés, et le pied gauche comme sur le point de soulever le jupon mousseux de Nana. Le contraste entre cette nudité assumée et la tranquille assurance de l’homme élégant qui patiente ne laisse aucun doute sur la nature de leurs relations. Autour du couple, on devine un intérieur cossu de meubles bourgeois et, sur les murs, une fresque d’inspiration japonisante, conforme aux goûts d’époque. Ce tableau de Manet illustre bien l’analyse sociologique menée par l’historien Alain Corbin, qui évoque le luxe ostentatoire des grandes courtisanes du début de siècle, recevant chez elles leur clientèle galante.

Le texte de Huysmans offre un tout autre aperçu sur la prostitution. C’est en effet la vie misérable des prostituées les plus modestes qui est évoquée dans ce passage de l’histoire de Marthe. L’établissement dans lequel elle travaille propose à une clientèle populaire les services des prostituées, en marge d’une activité de débit de boissons. Les filles employées sont asservies, et le narrateur s’emploie à dénoncer leur sort. On devine sa compassion à l’emploi d’un vocabulaire affectif : « abominable vie », « odieux métier », « terrible vie », « misérable », « ces malheureuses ». Les antithèses telles que « gaie ou triste, malade ou non », et l’énumération de verbes d’actions (« qui vous force à sourire […] qui vous force à vous étendre ») évoquent toutes les contraintes de la vie de prostituée. Le narrateur cherche même à susciter un sentiment d’horreur en jouant des comparaisons dépréciatives : « vie plus effroyable que toutes les géhennes [...] que toutes les galères, que tous les pontons ».

L’ensemble de ces documents témoigne donc de réalités sociales bien différentes. Pour quelques très rares femmes, qui échappent à la misère en jouant de leurs charmes, et font une brillante carrière de demi-mondaine, l’immense majorité des prostituées est réduite à une misère sordide et condamnée par les jugements sociaux.

 

Plan possible pour répondre à la question de corpus :

1. Des réalités sociales bien différentes

2. Une vie parfois choisie, souvent subie

3. Un thème littéraire et artistique entre idéalisation et réalisme

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