introduction

Télémaque reprend les schémas de l’épopée, les adapte aux exigences du roman et leur donne un sens particulier : une initiation.

 

I. L’intertextualité

Le livre se présente comme une suite du 4ème livre de l’Odyssée. Fénelon veut retrouver les valeurs de l’épopée, qui est un récit célébrant les valeurs religieuses et collectives. On est dans un roman qui se prend pour une épopée, un roman qui aura des aspects poétiques et épiques.

Les références à l’Odyssée sont importantes : on ouvre le roman avec Calypso… comme si l’histoire de Calypso et Télémaque était le recommencement de l’histoire d’Ulysse et Calypso. Pourtant, le roman du fils n’est pas la parodie du roman du père : Fénelon rêve plutôt de couler son discours dans le moule éternel légué par l’Antiquité. C’est l’utopie du classicisme…

 

II. Le schéma actantiel

Dans tout récit se dégage un héros (le sujet), qui se détache des autres par ses exploits. Il reçoit (d’un destinateur) une tâche à accomplir (une mission qui définit l’objet de son désir, le destinataire), a des auxiliaires (adjuvants) et des adversaires (opposants). Cela correspond à trois activités fondamentales : Vouloir / Pouvoir / Savoir

Télémaque est le sujet, ce qui le qualifie, c’est la parole et le récit. Dire, c’est être, on est héros parce qu’on est orateur, et inversement (le pouvoir de la parole et la parole du pouvoir sont liés).

Les opposants sont très nombreux, ce sont à la fois des hommes (comme Métophis, le mauvais conseiller de Sesostris au chapitre 2), des rois (Aceste, Adraste), des dieux (Calyspo, Vénus, Neptune…). Le sens étymologique de Télémaque est « celui qui combat au loin » : il combat jusque dans les sphères célestes.

Les adjuvants : Mentor. Le couple Télémaque / Mentor installe une dualité dans l’œuvre, entre une être humain, en devenir, et un être divin, éternel. La structure de l’œuvre invite à lire un roman de formation, où on passe de l’humain au divin, on accède à un rang supérieur.

L’objet du désir : en apparence Ulysse, le père. En réalité, il s’agit de s’élever au rang de dignité du père, il s’agit de trouver la sagesse et l’héroïsme, bref, de devenir un dieu.

 

III. Narratologie : la structure de l’enchâssement

Les Aventures de Télémaque sont enchâssées dans L’Odyssée. Homère a laissé en suspens entre les livres 4 et 15 les aventures du fils d’Ulysse. Normalement, ce suspens ne devrait durer que quelques jours… mais ici, le temps est arbitraire,

Les Aventures de Télémaque enchâssent d’autres épisodes, d’autres histoires : des récits rétrospectifs (de Télémaque à Calypso, d’Adoam / Idoménée / Philoctète / Mentor à Télémaque) et des récits dans le récit, comme les utopies…

La composition en abyme n’est pas un simple ornement, ni une virtuosité gratuite. C’est d’abord une structure (une figure) de la profondeur. C’est l’idée qu’on doit s’enfoncer dans une quête vertigineuse.

Ces enchâssements fonctionnent comme des digressions qui nous éloignent de l’histoire principale : le livre tend à se dissoudre dans la rêverie, c’est une évasion dans un ailleurs poétique, un ailleurs qui est aussi un au-delà. Le texte se finit dans l’extase mystique, dans la rencontre avec l’ineffable, l’indicible. Le terme de cette écriture, c’est le Verbe, l’au-delà du langage.

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