commentaire comparé

les portraits de Quasimodo et Gwynplaine

Quelques éléments en complément de ce qui a été dit en classe :

I. Des portraits spectaculaires : le corps mis en scène

 

1- La théâtralité du lieu est évidente dans Notre Dame de Paris, avec la mise en scène. Ce thème fait écho au champ lexical de l’apparence et de l’apparition dans l’homme qui rit (opposition entre le dehors et le dedans, l’être et le paraître revient comme un leitmotiv). Le pronom « on » donne l’impression d’assister à la scène, et les démonstratifs « ce ces... » renforcent l’illusion d’avoir un spectacle sous nos yeux. (hypotypose)

2- Ajoutons que le visage de Gwynplaine est un masque, l’expression « pétrifiée » rappelle le masque des comédiens antiques. De même, « toute sa personne était une grimace » signifie que le corps de Quasimodo est un costume

3- Ces corps sont déstinés à un public : il s’agit de faire rire l’assemblée. Il y a un effet véritablement mécanique qui est produit sur la foule lorsque Gwynplaine apparaît : « il fallait rire », cette obligation est soulignée par le caractère « automatique » du rire, c’est-à-dire qu’il y a de l’automate dans ce corps. L’assemblée dans notre Dame de Paris n’est pas seulement dans une réaction mécanique, il s’agit d’un triomphe et d’une joie soulignés par le voc religieux et la lumière qui transfigurent ce corps défiguré.

 

II. Des incarnations de la contradiction : le corps écartelé

 

1- le rire de Gwynplaine masque une souffrance : la mutilation est évoquée. Ce rire n’est pas comique, mais tragique. La première phrase est d’ailleurs encadrée par ce mot, qui semble piéger le personnage. La multiplication des phrases négatives peut témoigner de la résignation impuissante du personnage. Notons que le portrait du visage de Quasimodo se termine par l’évocation d’un « mélange de malice, d’étonnement et de tristesse ».

2- le corps est sous le signe du chaos, de l’harmonie perdue : le désordre de la description rend compte du visage chaotique de Quasimodo. Les connecteurs d’opposition « pourtant il ne riait pas », ou «  quoi que fît Gwynplaine, quoi qu’il voulût, quoi qu’il pensât, [...] l’éclat de rire foudroyant » rendent compte de l’opposition entre ce que pense le personnage et ce qu’il montre.

3- ces corps sont ainsi ironiques : ils disent autre chose que ce que les personnages pensent. Le corps ne signifie pas ce qu’il devrait « s’il eût pleuré, il eût ri » : le sourire ne signifie plus rien. Le corps n’a pas de sens, il part dans tous les sens, au point qu’il devient un défi pour le narrateur en charge de la description

 

III. Des monstres entre grotesque et sublime

1- la dimension fantastique de ces textes efface les frontières entre le réel et l'imaginaire : avec le monstre, tout devient possible. Le mystère et l'étrangeté dans l'Homme qui rit font écho à la dimension sacrée de Quasimodo, qui devient une gargouille, un être à la frontière entre l'ici bas et l'au-delà.

2- des personnages à la frontière de l’humain : le corps de Gwynplaine est une mécanique pétrifiée, on est en deçà de l’humain, alors que le corps de Quasimodo est magnifié.

3- l'esthétique romantique allie grotesque et sublime : la parodie, chez Hugo, permet de faire de Quasimodo un être entre le monstre et le saint. Le monstre est une nouvelle incarnation du héros, quand le héros, auparavant, était le tueur de monstres... La dimension comique est absolument absente dans l’Homme qui rit. Ici, le divorce entre l’apparence grotesque et l’intériorité sublime du personnage en fait le parangon du héros romantique, tiraillé, écartelé entre ces forces opposées.

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