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oedipe et le sphinx

Ingres, Œdipe explique l'énigme du sphinx

 

1. L'opposition entre le monstre, du côté de l'animalité sensuelle et féminine, et le héros, dans la position du penseur est spectaculaire. La composition du tableau, en X, symbolise à la fois l'énigme, et la confrontation.

 

2. Œdipe n'est pas un homme comme les autres : c'est un héros. A l'arrière plan, un de ses compagnons est reconnaissable, et apparaît comme son double, avec le même voile. Mais ce faire-valoir est en mouvement, quand Œdipe représente la stabilité et l'équilibre. Alors que le sphinx a une patte en l'air, Œdipe multiplie les points d'appui : ses pieds mais aussi ses lances ou ses coudes suggèrent une solidité qui s'oppose à la légèreté toute aérienne du sphinx.

 

3. Le monstre est dans la grotte, enfoui dans un espace sombre et restreint, régressif et agressif : il règne sur un univers minéral, brut, une montagne de pierres et de cadavres. Au contraire, Œdipe est baigné par la lumière (les Lumières qui éclairent l'esprit!), et derrière lui s'ouvre un espace ouvert, une perspective qui se perd vers la ville et la civilisation. Héros civilisateur, Œdipe est celui qui fait passer l'humanité de l'état de nature à l'état de culture en définissant l'homme comme l'être qui peut se maîtriser, maîtriser le monstre et la bestialité qui est en lui (en psychanalyse, le ça). Ses mains, qui soulignent ses propos et s'articulent comme un véritable langage, ses mains qui expliquent (ainsi que le suggère le titre), s'opposent à la patte agressive.

 

1. Le sphinx est également représenté sous des traits qui mélangent féminité et bestialité. Ici, cependant, on a une dimension plus érotique, avec le regard, la proximité des corps nus, et la position proche de l'étreinte. Le sphinx est tout en courbes féminines et a des traits particulièrement fins, quand Oedipe est athlétique, du côté de la verticalité toute masculine, avec son attribut, la lance, forcément symbolique… Les personnages sont d'ailleurs encerclés par les couleurs chaudes qui peuvent évoquer aussi bien la passion que le sang des victimes du monstre. Le rapport entre le monstre et le héros est plus intime que dans le tableau précédent, l'interprétation sera sans doute plus personnelle...

2. Une réécriture. Ce corps à corps ambigu s'oppose au modèle de Ingres : Œdipe est en position de supériorité, son corps n'est plus celui du penseur, mais celui du guerrier. La sphynge est toute en souplesse, le corps d'Oedipe est rigide. La sphynge n'est plus dans une grotte, nous sommes au contraire au bord d'un précipice. Au premier plan, des corps démembrés rappellent les ossements sous la grotte de Ingres, comme dans un miroir. Miroir renversé de son modèle, ce tableau ne propose plus un idéal héroïque, mais une lecture personnelle.

3. Une lecture symbolique. (G. Moreau est considéré comme un symboliste). Cette lutte à la fois violente et érotique peut figurer un cheminement personnel de l'artiste face à son œuvre, en duel avec la beauté qu'il cherche à dompter. Dans ce tableau qui est une sorte de mise en abyme, le paysage est alors sous le signe de cette double postulation : le ciel se fond avec les ailes qui désignent l'Azur , quand le sol reprend les couleurs fauve…

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