correspondances

document complémentaire

I. Un manifeste symbolique

1. Un discours philosophique sur l’homme et la nature

> verbes au présent de vérité générale dans la 1ère strophe, tournure impersonnelle des tercets « il est des parfums... ». La structure du poème va du général, dans les quatrains, au particulier (exemples) dans les tercets, suivant une démarche argumentative déductive.

> majuscule à Nature, et dimension universelle de « l’homme ». Ces 2 éléments sont en tête de vers. Il s’agit de cerner la place de l’homme dans la nature : alors que la Nature est du domaine du stable (image des piliers, verbe être) et de l’éternité (image du temple), et que l’homme est du côté du mouvement (il passe, « à travers », et le verbe « passer » peut signifier « mourir »).

>> correspondance = alors un rapport logique entre deux ensembles (homme et nature), qui place la figure de l’analogie au centre de ce système de connaissance

 

2. les synesthésies : un art de voir

> des éléments sonores (« échos ») deviennent visuels (« longs ») : on est dans l’univers de l’impropriété, cf « vaste nuit / clarté ». On attribue aussi des caractéristiques humaines à des parfums « corrompus, riches,... ». Dans ce décalage, s’exprime la vision artistique de l’analogie.

> premier tercet : ouverture de la palette des sens dans une chaîne qui relie olfactif / toucher / ouïe / vue… : c’est la dimension horizontale des synesthésies. On a même une association entre l’inanimé (parfum) et l’animé (chair d’enfants), témoignant d’une animation de l’analogie. Ces synesthésies sont soulignées par des adjectifs « frais / doux / verts », monosyllabiques et renvoyant à une image idyllique, paradisiaque.

> d’autres synesthésies sont ensuite évoquées, marquées par des adjectifs longs « corrompus, riches et triomphants » avec allongement du e muet, de la diérèse, et de l’enjambement. Ces synesthésies sont verticales, elles rendent compte d’une correspondance entre le monde des sens et le monde de l’esprit. On est dans la logique de l’expansion hyperbolique, vertigineuse, soulignée par les assonances en i (riche / triomphant / expansion / infini)

 

II. La poésie comme déchiffrement

1. une poésie sacrée

> la métaphore : une figure qui permet de rendre compte d’une spiritualité du monde. « La nature est un temple » = signe de religiosité, mais en plus, la nature est de plus en plus personnifiée, avec les « vivants piliers », qui « observent » les hommes.

> Les confuses paroles, puis les échos qui de loin se « confondent » insistent sur une parole cachée. La nature parle, les piliers « laissent sortir » des paroles à interpréter, comme le faisaient les prêtres dans l’antiquité.

 

2. La poésie comme révélation

> Passage également, dans la 2ème strophe, des ténèbres à la lumière : ténébreuse, profonde, nuit > unité, clarté. On passe du chaos à la création à travers l’anagramme du mot unité, qui contient la nuit et rime avec clarté, et également à travers l’analogie « vaste comme la nuit et comme la clarté » : la logique poétique est paradoxale, elle déborde la logique rationnelle.

> Passage de la matière à l’esprit : à travers les synesthésies, mais aussi à travers l’évocation des parfums dans l’énumération « l’ambre, le musc, le benjoin et l’encens » : on passe de l’animal sous forme minérale ou liquide au végétal, du solide au liquide et à l’aérien. L’encens est de plus utilisé dans les cérémonies religieuses. On a ainsi une invitation à l’élévation.

 

3. le poète démiurge

> la poésie anime le monde, on va vers le mouvement : la personnification de la nature à travers les vivant pilier est reprise par le passage de l’inanimé à l’animé dans les synesthésies. Enfin, le dernier tercet, sous le signe de l’expansion et du transport, développe ce thème d’une mise en mouvement.

> On passe, dans ce mouvement, de la perception du monde à sa compréhension. L’ultime sens convoqué est alors celui du chant, renvoyant au poète, véritable démiurge capable de dévoiler le sens caché du monde dans son œuvre.

 

III. La nature artiste

1. continuité de l’histoire de l’art

> une nature architecturale : les « vivants piliers » sont les arbres qui créent une sorte d’architecture naturelle. On est d’abord dans un art classique, avec le temple antique. Passage ensuite à la forêt de symbole, et à l’art symboliste à rattacher aux « confuses paroles » et l’esthétique du mystère.

> les synesthésies horizontales sont sous le signe de l’innocence, alors que les synesthésies verticales sont sous le signe de la corruption. Chaires d’enfant renvoient aussi aux madones et nativité de l’histoire de l’art traditionnel, hautbois renvoient à idéal d’ordre de la musique classique, prairies renvoient à l’imaginaire bucolique… Puis on bascule dans une autre esthétique : celle des fleurs du mal, n’hésitant pas à trouver la richesse de la beauté dans le mal et la corruption.

>> correspondances : aussi un sens très moderne, avec l’essor du chemin de fer. Il s’agit de prendre une nouvelle direction, une bifurcation.

 

2. Un poème polyphonique

> les jeux de regards et de paroles instaurent un dialogue entre l’homme et la nature. On est dans une poétique de l’écho, qui exprime une circulation du sens : cf 2ème strophe : « comme écho qui confondent, comme comme clarté couleur... »

> écho surtout entre verbes « se confondent » / « se répondent » ( avec rime interne « profonde ») : la voix pronominale avec un sens réciproque insiste sur l’idée d’un échange, d’une action où l’on est à la fois le sujet et l’objet. le tiret « - et d’autres » semble faire figurer visuellement la marque d’un dialogue, avec la présence d’une deuxième voix.

>> correspondances = alors au sens épistolaire : un échange, un dialogue. Les regards « familiers » laissent entendre que les échanges sont réguliers.

 

 

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