doc complémentaire : bateau ivre

Quelques éléments à retenir sur ce poème

I. Structure du texte : de l'ivresse à la désillusion, le récit d'un échec

 

>strophes 1 à 7 : de l'affranchissement du bateau à l'euphorie de l'absence de contraintes

>strophes 8 à 14 : bilan au présent / passé composé

> strophes 15 à 21 : le regret et l'amer constat de ces souvenirs d'ivresse

> strophes 21 à 25 : retour au réel marqué par la réduction de l'univers aux dimensions d'une coquille de noix.

On va ainsi de l'ivresse à l'anéantissement : les adjectifs positifs du début marquent l'horreur à la fin : « atroce, amer, Noire, froide » pourraient qualifier une mort…

Métaphores et comparaisons transforment le Je du poète en vaisseau aérien, en martyr languissant, en femme en prière… Le Je devient sans cesse un autre dans ce laisser aller inconscient : après l'actif, c'est le passif qui domine (bateau perdu, jeté, ballotté).

La décomposition affecte aussi le paysage : les oiseaux salissent le bateau de leurs fientes, puis l'éther est dit « sans oiseau ». Les gouffres se creusent : un « entonnoir » devient bientôt « rut de Béhémot »…

La coque du bateau n'est plus qu'une coquille de noix (on notera le passage de la « coque » à la « quille »). Le Je aux aspirations immenses se retrouve asphyxié, dans un univers étriqué.

 

II. Une écriture de la révélation : audaces et défis de la voyance

 

éloge de la sauvagerie, du retour du primitif : l'humain est dégradant, les marins sont affairés par des voyages à but économique, et leurs vomissures signale leur décadence. Le bateau, au contraire, est du côté de l'élémentaire, du pur

l'errance du bateau est associée à l'imaginaire de l'enfance, nouvel avatar du poète. Le mot bateau, plustôt que navire ou vaisseau, ramène d'ailleurs au lexique de l'enfance. Encadré par les Peaux rouges et l'enfant qui joue dans la flache, l'univers poétique rend hommage à la magie du jeu de l'enfance. Notons que l'univers maritime peut renvoyer à une forme de régression, cet univers lactescent étant nourricier...

S'affirme ainsi le désir sauvage d'une liberté qui contamine le monde : partout où passe le bateau, règnent la fête et le désordre, le tohu-bohu. La voyance ouvre à un univers qui fête les sens et leurs dérèglements : « sèves inouies », « noirs parfums », « poissons chantants » vont au-delà de la synesthésie, il s'agit de faire fusionner le concret et l'abstrait, le monde sensible et celui des idées...

 

III. Une écriture moderne : la parabole de l'inspiration, trajectoire du poète

 

1. Dans cette fête verbale, dans cette orgie de mots, il semble que le signifiant prime sur le signifié : des chaînes sonores lient les mots « enfants flots fleurs ineffable » strophe 15, « pôles zone sanglot » et « roulis doux ventouses genoux » strophe 16… Les images aux couleurs et aux formes proliférantes disent l'exaltation du poète porté par le sentiment d'omnipotence et la foi dans son art.

 

2. Si le bateau est bien une métaphore filée du poète voyant, on voit aussi que cette nouvelle voie est hantée par l'échec. L'envol est souillé par les fientes des oiseaux, l'enthousiasme ne peut se dire sans sa désillusion.

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