Texte 1, Rhinocéros

problématique : comment l'irruption de l'étrange dans cette scène d'exposition permet de présenter les personnages de manière distanciée ?

plan possible : I. Scène d'exposition : l'irruption de l'étrange / II. Deux personnages opposés / III. Un théâtre de la distanciation (un spectateur amené à prendre ses distances)… Nous suivrons un plan plus proche de celui du manuel cependant.

 

I. Jean = dominateur, conformiste, violent...

Jean utilise d'emblée l'impératif et des phrases exclamatives / interrogatives. Dans le couple, c'est lui le dominant, apparemment. Surtout, c'est l'emblème du conformisme : il est fier de sa normalité. Chiasme : « tout le monde travaille et moi aussi, moi aussi, comme tout le monde » : il y a parfaite adéquation entre lui et le monde… dans cette structure circulaire qui témoigne de vues limitées… L'importance de cette conduite sociale se lit dans l'exigence du devoir : bon citoyen, il veut être bon employé, et entièrement discipliné, il refuse les invitations à s'encanailler. Il impose une forme de dictature de la médiocrité « tout le monde doit s'y faire »

Il se pose ainsi en homme supérieur. Son orgueil se lit dans son argumentation : il se hisse au niveau de son ami « je vous vaux bien », puis il le dépasse « je vaux mieux que vous », et enfin, il écrase Bérenger avec son aphorisme sur l'homme supérieur qui brosse son autoportrait. La violence du personnage se lit dans ses propos injurieux « j'ai honte d'être votre ami », ainsi que dans le fait de n'avoir pas été invité (c'est sans doute pas un joyeux luron)

Enfin, c'est un personnage satisfait de lui-même : le mot « libation » traduit un pédantisme qui affiche un mépris. Il incarne ainsi les gens qui imposent un conformisme aliénant, usant d'un langage creux où foisonnent les lieux communs (aphorismes, impératifs, etc.)

 

II. Bérenger = un somnambule mou, inadapté à la société, mais doué d'esprit critique.

A la dureté de Jean répond la mollesse de Bérenger (didascalies) ainsi que sa tenue et son air négligé (sorte de Gaston Lagaffe). L'absence d'énergie est signe d'inadaptation : il s'ennuie, cherche des distractions.

Personnage de la fête et des vacances (ce que Jean souligne), il ne s'intègre pas facilement au monde du travail, visiblement. Son problème avec l'alcool est souligné, et contribue à construire une figure de marginal. Figure de mélancolique ? Reprise du poète maudit ?

En tout cas, ses qualités humaines transparaissent : la modestie contraste avec l'orgueil de son acolyte, son souci de l'autre est mis en avant, et son ironie est la marque d'un esprit affuté. (ironie = discours qui brise les discours tout faits)

 

III. irruption du rhinocéros :

L'univers quotidien prend vite une tournure absurde : montrer le quotidien au théâtre, c'est peu spectaculaire… on est ensuite vite dans la caricature, avec les deux personnages opposés qui peuvent rappeler les couples comiques (Laurel et Hardy…) d'autant que le nom de l'ami, Auguste, renvoie à l'univers du cirque.

le bruit qui progresse n'interrompt pas le dialogue dans un premier temps, alors qu'il devrait faire peur : le monstrueux surgit et s'expose avec brutalité. Les bruits sauvages se superposent au dialogue, au point que Jean force la voix jusqu'à crier pour se faire entendre (sans doute devient-il ainsi bestial !).

Les deux personnages n'entendent pas le monde autour d'eux… un décalage se fait entre les personnages et le public, invité à s'interroger. L'absence de curiosité hors de l'égoïsme familier est dénoncée. Ce décalage est extrême lorsque le spectateur ne perçoit même plus les paroles de Béranger.

La réaction de Jean, enfin, est stéréotypée : « que se passe-t-il ? » (langage soutenu) puis « mais qu'est-ce que c'est » (langage familier)… son étiquette d'homme supérieur se fissure…

 

L'impératif de Jean « tournez-vous », invite à changer de posture, à effectuer une « conversion » (au sens étymologique) idéologique. Le spectateur ne peut avoir envie de suivre un tel personnage… du coup, n'est-ce pas la dénonciation d'une « imposture », et un appel à la révolte, qui peut se lire dès les premières ligne ? De même, le mur qui soutient Béranger, annonce-t-il une impasse (selon Jean) ou au contraire une résistance nécessaire ? Aux affirmations

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