texte 3, On ne badine pas avec l'amour

le titre : opposition entre le badinage (côté ludique, qui nous mène dans un jeu de comédie) et l'amour (dimension sacrée, qui exige un engagement de l'existence, et qui peut revêtir une dimension tragique). On est en plein drame romantique.

 

I- Un dénouement construit sur un renversement de situation

1. Un dénouement construit sur des oppositions

- On croit à un dénouement de comédie (Les personnages devraient se marier, célébrer la vie)… le mariage tourne à l'enterrement, et rejoint la tragédie par bien des aspects.

=> homme/femme, humain/divin, rapprochement/éloignement, amour/mort : esthétique de l'antithèse, qui rappelle principes du romantisme

 

2. Annonce d'un dénouement heureux

- Camille et Perdican sont sincères - Camille comprend qu’elle se mentait à elle-même, Perdican se rend compte que lui aussi avait un obstacle qui l’empêchait d’aimer Camille (symétrie)
- La parole se libère enfin : le pronom « nous » apparaît, il remplace le « je », l’orgueil qui dominait / Perdican fait un éloge de l’amour à travers une tirade (parole libérée)
=> Les gestes sont en accord avec la parole : -Perdican prend Camille dans ses bras- Camille répond et pose sa tête sur la poitrine de Perdican - Perdican embrasse Camille…

 

3. La désillusion fatale

- La fatalité est présente chez Camille - puis chez Perdican, sous la forme de l’orgueil, comme une entité supérieure

- pas d'avenir possible : Perdican envisage l'avenir sous le signe de l'irréel, et Camille sous le signe de la religion (le couvent)

- le grand amour laisse place à la mort sans grandeur : Perdican est apeuré, le dernier mot de Camille est expéditif, ce n'est plus le temps des grandes tirades lyriques

=> le spectateur était en position de supériorité, il voyait le jeu de Perdican et pouvait s'amuser du quiproquo initial. Cependant, il ne voyait pas Rosette, qui ne jouait pas avec les sentiments.

 

II. Une communication impossible sur scène

1. des monologues bavards (faits pour être entendus)

> refus du dialogue en ce qui concerne Camille dans la scène 7

> le monologue de Perdican = fait pour être entendu

> présence du témoin caché : paroles entendues par plus de personnages qu'on pourrait croire (en fait il y a 2 témoins cachés : d'abord Perdican, puis Rosette)

=> on est dans une sorte de démultiplication de la double énonciation propre au théâtre

 

2. Des dialogues silencieux (rapprochement illusoire des personnages)

> prises de paroles sous le signe du cercle, de la fermeture… sorte d'ironie tragique (effets d'échos entre les paroles de Perdican : « enfants », « jouet »...)

>Une structure sous le signe de l'impossibilité de communiquer : symétrie : Camille (seule)–Perdican (seul)– dialogue Camille/Perdican—CRI–dialogue Camille/Perdican—Perdican (seul)–Camille.

> dialogue qui sépare le couple et mène au silence (Adieu)

=> l'aveu de l'amour (attendu dans comédie) est causede la mort de Rosette (du tragique)

 

3. le malentendu et la confusion

> Perdican se trompe sur l'acquiescement du divin à leur union

> thème de la tromperie généralisée, et thème du rêve qui renvoie à instabilité des signes

=> confusion générique également = le propre du drame romantique

 

III. Une communication impossible entre l'humain et le divin

1. une scène symbolique : nous sommes dans un lieu sacré

> Dieu et Rosette : axe vertical

> Camille et Perdican : axe horizontal

=> la scène, l'espace est placé sous la figure (le signe) d'une croix, qui à la fois signale la religion et l'interdiction de tout bonheur

 

2. Le silence et le cri (expression digne d'un « oratoire »)

> silence divin

> cri de Rosette / dieu / spectateur

> parole qui devient prière / lyrique : dimension surhumaine (cf dernières paroles de Perdican : Mon dieu / Dieu juste / ô Dieu!)

=> en deçà ou au-delà du langage (dimension poétique)

 

3. Le visible et l'invisible

> importance du hors scène (galerie infernale sous l'autel) : l'essentiel nous échappe

> ici-bas et au-delà dans le langage de Perdican = incompatible (impossible réconciliation romantique)

=> impossible mise en scène également : les conventions théâtrales et leurs artifices sont ici exhibées (on voit ce qu'on ne peut voir)=> dimension religieuse du théâtre ?

 

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