Texte 2, Hugo

Hugo, Elle était déchaussée

Elle était déchaussée, elle était décoiffée,
Assise, les pieds nus, parmi les joncs penchants ;
Moi qui passais par là, je crus voir une fée,
Et je lui dis: Veux-tu t'en venir dans les champs ?

Elle me regarda de ce regard suprême
Qui reste à la beauté quand nous en triomphons,
Et je lui dis: Veux-tu, c'est le mois où l'on aime,
Veux-tu nous en aller sous les arbres profonds ?

Elle essuya ses pieds à l'herbe de la rive ;
Elle me regarda pour la seconde fois,
Et la belle folâtre alors devint pensive.
Oh! comme les oiseaux chantaient au fond des bois !

Comme l'eau caressait doucement le rivage !
Je vis venir à moi, dans les grands roseaux verts,
La belle fille heureuse, effarée et sauvage,
Ses cheveux dans ses yeux, et riant au travers.

 

 

I. Un poème lyrique, une rencontre bucolique :

- jeu de regards (jeu sur présence / absence, fascination réciproque à travers les pronoms qui se croisent, une vision ...)

- invitations à la rencontre (dialogue / silence, effet de retardement...)

- célébration de la simplicité (chanson populaire, lexique courant tutoiement et poésie prosaïque, cadre rustique, débarrassé des contraintes sociales… une utopie)

- un lyrisme heureux (évolution de l'articulation : dire / chanter / rire : vers l'extase!)

 

II. érotisation de la scène

- le corps mis à nu (érotisme du pied, importance des adjectifs)

- une nature érotisée (les joncs penchants > les grands roseaux verts / « dans les champs > sous les arbres > au fond des bois… : intimité de plus en plus explicite /

- un univers caressant qui sert d'écrin à cette harmonie (jeu entre le règne aquatique, féminin, et la nature, masculine / jeu sur le franchissement heureux, caressant, des frontières entre le désir et l'interdit / entre le singulier et l'universel...)

 

III. une scène mythique

- un personnage fantasmagorique : la nymphe / fée / Vénus qui sort de l'eau… : un personnage plus rêvé que réel, affranchi de toutes les conventions mondaines...

- le temps de l'origine : l'aurore, le printemps, la jeunesse

- esthétique du négligé

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